[CHRONIQUE] Les sorcières de Pendle de Stacey Halls
Les sorcières de Pendle de Stacey Halls
Editions : Michel Lafon
399 pages
Paru le 24 Septembre 2020
Aperçu : Lancashire, Pendle, 1612. A 17 ans, Fleetwood Shuttleworth est enceinte pour la quatrième fois. Mais après trois fausses couches, la maîtresse du domaine de Gawthorpe Hall n'a toujours pas donné d'héritier à son mari. Lorsqu'elle croise le chemin d'Alice Gray, une jeune sage-femme qui connaît parfaitement les plantes médicinales, Fleetwood voit en elle son dernier espoir. Mais quand s'ouvre un immense procès pour sorcellerie à Pendle, tous les regards se tournent vers Alice, accusée comme tant d'autres femmes érudites, solitaires ou gênantes.
Alors que le ventre de Fleetwood continue de s'arrondir, la jeune fille n'a plus qu'une obsession pour sauver sa vie et celle de son bébé : innocenter Alice. Le temps presse et trois vies sont en jeu. Être une femme est le plus grand risque qui soit.
Mon commentaire général : Au cœur des procès de sorcières…
Ma note : 8/10
La citation qui résume tout : « Un destin effroyable nous liait, et nous avions désespérément besoin l’une de l’autre pour affronter l’adversité. » (p.365)
Mon avis (garanti sans spoiler) :
Bienvenue à Pendle, dans le Lancashire (Nord-Ouest de l’Angleterre). Nous sommes en 1612 et suivons Fleetwood, la jeune maîtresse de Gawthorpe Hall.
À 17 ans, Fleetwood en est déjà à sa quatrième grossesse, sachant que les trois premières se sont soldées par des fausses couches. Craignant pour sa vie et celle de son bébé, elle fait appel à une jeune femme qui a soigné sa cheville avec succès et dont la mère était sage-femme. Alice semble faire des miracles sur la santé de Fleetwood, grâce aux plantes qu’elle connaît parfaitement. Or, la jeune femme est mise en cause dans le retentissant procès des sorcières qui secoue la région. Fleetwood sait que pour sauver son bébé, elle doit faire innocenter Alice…
Les sorcières de Pendle est à la fois un roman historique et un roman d’ambiance. L’autrice s’est inspirée du véritable « procès des sorcières du Lancastre ». Les personnages ont réellement existé, tout comme les évènements. Le récit est ainsi extrêmement bien documenté. Stacey Halls a imaginé tout ce qui s’était passé entre les lignes des livres d’histoire, en essayant de donner des motivations à ces personnes du passé qui prennent vie sous nos yeux.
Avec comme sujet la sorcellerie, le roman s’attache à montrer le pouvoir des croyances, l’ambition et les vengeances qui se cachent derrière ces accusations, mais aussi la place des femmes dans la société de l’époque. Une femme trop savante ou trop indépendante ne pouvait être qu’une sorcière… On ressent ainsi cette ambiance lourde, quand parler ou s’opposer à une injustice flagrante revient à reconnaître sa complicité.
C’est un roman qui commence doucement, le temps de bien nous plonger dans le contexte historique, et qui s’accélère ensuite, avec la prise de conscience du lecteur concernant les enjeux pour chacun des personnages.
Les sorcières de Pendle est un livre qui remue. On ne peut que se révolter devant tant d’obscurantisme et de dénigrement des femmes. Pourtant, c’est notre passé, voire notre présent. En mettant sur le devant de la scène ces évènements vieux de 400 ans, Stacey Halls nous montre que le chemin parcouru pour l’égalité des genres n’est pas si étendu et qu’il nous reste encore pas mal d’efforts pour y parvenir.
Et maintenant, passons à mes commentaires non censurés... Attention spoilers ! Si tu ne veux pas en savoir plus sur l'histoire, arrête-toi ici !
Mes commentaires non censurés :
En juxtaposant Fleetwood et Alice, deux femmes issues de classes sociales diamétralement opposées, Stacey Halls nous montre que le sort d’une n’est finalement pas enviable à l’autre.
Au final, elles subissent toutes deux la pression de la société, faite par les hommes, pour les hommes.
Fleetwood a été mariée extrêmement jeune, et peut s’estimer heureuse d’avoir terminé avec Richard. À seulement 17 ans, elle en est à sa quatrième grossesse, avec tous les problèmes de santé que cela lui a causé. Elle a beau être maîtresse de Gawthorpe, elle n’a finalement pas son mot à dire. Tout juste a-t-elle le droit de se révolter parce que son mari a une maîtresse ! Et encore, il lui faudra accepter.
De son côté, Alice est accusée de sorcellerie à cause de son ancien amant alcoolique, dont on ne sait pas s’il est plus bouleversé par la mort de son enfant ou de la perte de sa source de revenus (Alice elle-même). Roger, aveuglé par l’ambition, est prêt à entendre toutes les calomnies, du moment qu’elles lui permettent de faire pendre le plus de « sorcières » possible. Pour cela, il va jusqu’à soudoyer une enfant, en lui faisant miroiter une vie dont il la chassera dès qu’il n’aura plus besoin de ses services…
Au-delà d’un roman historique, Les sorcières de Pendle est donc aussi résolument féministe. Un livre qui dénonce les violences perpétrées par les hommes sur les femmes, et cela depuis toujours. Certains actes ou comportements ont encore court aujourd’hui (dénigrement de la science d’Alice parce que c’est une femme, injonction à la maternité, justification de l’infidélité de Richard par ses « besoins », etc).
D’un fait historique, en se demandant pourquoi seule une personne a été acquittée d’un procès pour sorcellerie, Stacey Halls a réussi à imaginer la vie de deux femmes dans leur époque, les rapprochant pour mieux montrer leurs similitudes. Pas mal pour un premier roman !
Et toi, Ami Lecteur, qu’en penses-tu ? T’es-tu déjà intéressé aux procès de sorcières ?
Dis-le moi en commentaire.